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Strauss-Kahn ou le très moderato cantabile

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porte.jpgDans une culture où l’abréviatif envahit le discours, avouez que DSK sonne bien. Ça fait tout de suite plus fastoche à retenir que Dominique Strauss-Khan. Ça a l’avantage de l’efficacité et vous parachute un ego au firmament des vanités à vitesse supersonique.

Vrai qu’il devient de plus en plus difficile de réfléchir tant les choses vont vite. Tant la rapidité voulue par chacun devient un obstacle pour tous. Les idées vacillent, la langue fourche et la cohérence en prend pour son grade. A peine reçue, réduite à son plus simple appareil, l’information se doit d’être catapultée en toute hâte, de peur que le retard pris par la réflexion vous empêche d’être le premier à l’avoir relayée et parfois commentée.

De ce point de vue, Dominique Strauss-Kahn est un homme qui prend son temps. Il jauge, calcule, compte et pèse. A telle enseigne qu’on peut se demander si, fort de toutes ces équations, il ne cherche pas à se faire désirer pour mieux nous prendre à ses filets. Depuis l’Amérique, malgré la somme de travail qui le submerge, il prend le temps de penser aux françaises-français. Quel citoyen !

Ce natif de Neuilly-sur-Seine – encore un ! -, directeur général du Fonds monétaire international depuis 2007, connait la musique. D’accord, tout le monde n’est pas de droite pure et dure – la preuve – dans cette commune, mais avouez que le pourcentage y est quand même très élevé. Le tempo de DSK se décline dans le moderato cantabile. Comme le dit Anne Desbaresdes, prof de piano dans le livre éponyme de Marguerite Duras, au gamin buté à qui elle donne des leçons : « tu pourrais t’en souvenir une fois pour toutes. Moderato, ça veut dire modéré, et cantabile, ça veut dire chantant, c’est facile. »

Voilà, hâtivement résumé, le fonds de commerce de Dominique Strauss-Kahn. Homme pondéré, on sent cependant bouillir en lui comme l’idée d’un destin national. Pour l’instant ça mijote.

Il y a quelques jours, il était l’invité, en vedette américaine, de l’émission A vous de juger, sur France 2. Pour la circonstance, c’est l’équipe de Chabot qui s’est délocalisée à Washington. Le genre d’émission qu’on ne présente plus et qu’on donne au public pour lui faire miroiter des choses. A l’occasion elle sert pour passer les plats au locataire de l’Elysée.

L’homme est grand travailleur et, à ce titre, il n’a pas le temps de perdre son temps à dévoiler ses projets personnels dans la perspective de 2012.

En revanche, en bon professeur (il a enseigné à l’ENA à HEC et à l’université Stanford aux States où il a été prof invité) il nous a fait un numéro très didactique de charmeur de serpent pour nous expliquer en quoi consistait la crise européenne. Devant le poste, nombreux sont ceux qui ont ri à gencive déployée. Nous expliquer la crise alors que tout le monde l’a en pleine poire, cela ne manquait pas d’aplomb. C’est comme si nous prenions un gars qui crève la faim pour lui expliquer dans un Amphi pendant quatre heures le pourquoi de son état alors qu’il a urgemment besoin d’un casse-dalle et de beaucoup d’hydratation !

Pour lui, la mondialisation n’est ni un problème, ni une épidémie. La chose ne le fait pas sourciller. Il suffit de l’accepter telle qu’elle est. La vie est simple avec Dominique. Il est pour l’ouverture de capitaux. A l’époque où il était ministre dans le gouvernement Jospin, il avait milité pour que les entreprises nationales s’ouvrent à des capitaux privés. Ainsi d’EDF, entre autres…

La mondialisation pour lui est une course qui ne sera gagnée que par les plus forts. Ce n’est qu’à ce prix que les français (les autres on s’en fout !) peuvent espérer atteindre ce qu’on appelle dans le milieu du foot, la Champion’s League ! Une défense de fer et un milieu en béton, voilà la recette. Pour cela, le français doit se montrer créatif et jouer en contre pour espérer planter un pion et réaliser ce qu’on nomme dans le milieu le « hold-up parfait ».

Homme de compromis, il ne voit qu’une solution pour la gauche, qu’elle bazarde ses guenilles, à la rigueur qu’elle les offre à un musée de la mémoire ou à la Croix Rouge et qu’elle s’ouvre sans complexe à la voie de la social-démocratie.

Alors candidat ou pas candidat aux primaires du PS pour la prochaine présidentielle ?

Au PS, ça tousse un brin quand même. Il y a encore des militants de gauche dans ce parti. Reconnaître l’abandon des idéaux socialistes au profit d’une idée bancale serait simplement désastreux pour sa dynamique. Le hara-kiri ne faisant pas parti des projets immédiats.

Même si, publiquement, Martine Aubry reconnaît à Dominique Strauss-Kahn des qualités, je ne pense pas qu’elle se montrera disposée à lui donner les clés de la boutique socialiste.

Une chose est sûre : le rejet de la politique insolente de Nicolas Sarkozy, ne doit pas conduire les opposants à faire ou à accepter n’importe quoi.

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17 Commentaires

  1. babelouest

    26 mai, 2010 à 2:27

    DSK ? Ne serait-ce pas le paravent derrière lequel un homme petit dans sa tête malgré six cerveaux prépare sa propre succession ?

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  2. b.mode

    26 mai, 2010 à 2:41

    Leurre c’est leurre. DSK ou la manière idéale de faire réélire Sarko ou son clone !

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  3. babelouest

    26 mai, 2010 à 3:20

    Après leurre, c’est pâleur :(

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  4. Nico93

    26 mai, 2010 à 6:23

    « il y a encore des militants de gauche dans ce parti »: dans mes bras camarade! Merci, ça faut chaud au cœur de bon matin.

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  5. babelouest

    26 mai, 2010 à 7:41

    Tu sais Nico, j’en ai aussi rencontrés sur l’Ile de Ré…
    http://iledere.parti-socialiste.fr/
    mais pas tous les jours….

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  6. remi begouen

    26 mai, 2010 à 9:32

    Il est facile de se croire ‘sincère militant de gauche’ au PS…en toute bêtise inconsciente de ‘l’esprit de parti’. J’en connais quelques uns à Saint-Nazaire, dits ‘de base’, et encore plus d’autres, par exemples des élus municipaux, qui ‘se la joue matamore’, et manipulent les premiers… Il m’est arrivé de discuter avec certains de ‘ces sincères’, de leur faire admettre que le ‘parti des éléphants’ n’avait plus rien de gauche, et qu’ils se faisaient ‘rouler dans la farine’ au nom du parti…
    D’ailleurs, de plus en plus de communistes sincères font le même chemin critique, puisque le PC se fait ‘rouler dans la farine PS’. Mais ‘l’esprit de parti’ est pire encore au PC.
    Conclusion : la vraie gauche ne peut être que radicalement anti-PS. Pas en position de départ, bien sûr, mais en conséquence de ses valeurs. Reste à y faire l’unité, du moins le rassemblement. Tâche principale, de longue haleine…

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  7. clomani

    26 mai, 2010 à 9:41

    Pour moi, DSK (typiquement US de s’appeler par ses initiales… en effet ! ) a été le modèle de Sarko, à moins que ce soit un de ses clones… avec moins de tics, une femme plus vieille (mais des compensations)…
    A signaler qu’au FMI, il contribue à affamer les pays pauvres. Rien que de savoir ça devrait suffire à cerner le bonhomme ! Ben non !
    Donc voilà, nous allons avoir le choix entre la peste et le choléra : deux mecs qui sont là pour la finance et pas pour la France et les Français.
    L’aut’jour, sur le marché bio très bourge (où je vais, mais je sais que j’ai une tendance bourge), j’ai rencontré une petite dame bien prop’sur elle, samedi dernier. Elle distribuait des bulletins d’adhésion au PS… je lui ai répondu : « pas assez à gauche » et suis allée papotter avec les sans papiers immigrés qui sont toujours en grève… parce que ça, oui, c’est une cause… pas le PS. Qui pense probablement comme Brice pas Nice des salariés immigrés : ça aide le patronnat…
    Quand les Français comprendront qu’en voulant dormir sur leur petit magot, ils vont le perdre grave, et que les pays pauvres vont être encore plus pauvres puisqu’ils sont détenteurs des matières premières, mais pas exploiteurs. Sauf que maintenant, les exploiteurs c’est de moins en moins les pays européens, de plus en plus les pays qui montent. Eux, ils n’en vooudront pas, d’immigrés africains… donc quel sera leur terre d’accueil ? Celle de l’ancien colonisateur où on se battra déjà pour bouffer…
    Bref, ces gros bourges créateurs de dette sont par la même occasion créateurs de violence. Ca, personne ne le sait.
    Va vraiment falloir partager, mettre en commun… cultiver son terrain, créer du lien et ce qui va avec… de la solidarité.
    Mal barrés, avec DSK, pareil sans !

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  8. nico93

    26 mai, 2010 à 12:15

    @babelouest Il se trouve que je vais sur l’île de Ré cet été. Je scruterai avec attention les estivants tout en quêtant des traces de vie de Lionel J.!

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  9. babelouest

    26 mai, 2010 à 12:22

    Arf ! Si çà se trouve, Nico, tu y vas plus souvent que moi (en chair et en os), vu que né à 50 Km de l’île mythique je n’y suis allé qu’une fois, il y a 44 ans….. mais le site sus-cité j’y vais tous les jours.

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  10. lapecnaude

    26 mai, 2010 à 14:55

    Ben moi, je me fais toute ptetiiiiiiite !

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  11. clomani

    26 mai, 2010 à 17:53

    Meu nan, La Pecnaude, tu assumais très bien l’aut’fois.
    Moi j’y crois pus. Ségo, elle m’a eue une fois, elle ne m’aura pas deux. Je n’ai jamais voté PS au 1er tour depuis 81 que je vote, sauf pour elle ! C’est dire…

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  12. remi begouen

    27 mai, 2010 à 3:04

    En Jamaïque il n’y a pas que l’icône Bob Marley. En France il n’y a pas que l’icône Johnny H. (encore vivante). Il y a les maffias. A Kingston, en ce moment, c’est la guerre ouverte (60 morts, officiellement) entre le gang de la drogue (etc.) et celui du gouvernement, deux proches. On n’en est pas là en France. A Neuilly, capitale de Paris, capitale de la France, il y a deux chefs de gangs proches, l’un au pouvoir de l’Etat l’autre à celui du FMI… qui lorgne à la succession. Ils sont proches dans ‘l’art’ de nous prendre en otage, nous, électeurs. Si on ne se réveille pas à temps, on va trinquer comme en Jamaïque !…

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  13. remi begouen

    27 mai, 2010 à 12:51

    En revenant de la manif – puisque la grève à la Poste est peu suivie – j’ai dans ma boîte à lettres le ‘Politis’ du jeudi. Il y a un grand article, très bon, de Michel Soudais : ‘l’offensive DSK’. Dont la phrase d’exergue dit :’Pour conquérir l’opinion, DSK doit faire oublier son image de chef d’orchestre planétaire des politiques d’austérité’. Et l’article révèle des ‘magouilles’ de divers barons du PS pro-DSK… brr, ça pue !
    A part ça, la manif ? ah oui… C’était la grand’messe comme d’hab…nettement moins colorée qu’au 1°mai. Mais j’ai toujours plaisir à rencontrer des amis, par exemple un postier en grève, et à entendre de belles vieilles chansons, par exemple espagnoles ou sur la Commune de Paris… ‘La Butte Rouge’…

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  14. laetSgo

    27 mai, 2010 à 14:35

    « une défense de fer et un milieu en béton » : l’alliance Dassault-Bouygues, quoi ! Nicos l’a déjà testée :-)
    j’ai vu cette émission…Et j’ai fulminé tout du long, me faisant par la même occasion copieusement engueuler par mon cher et tendre qui ne comprend pas que je me laisse avoir à ce jeu (il a dirigé un groupe JCR ds sa jeunesse, et est revenu de toutes ces indignations… »roulé dans la farine » aussi avant de claquer la porte du parti)
    brefle, je ne dirais pas que DSK = Sarko (je le crois nettement plus intelligent) mais en terme de politique appliquée, tous 2 au service du grand capital (n’ayons pas peur des maux, c mon côté marxiste qui ressort) contre les peuples !
    Rien à voir, mais ça me fait penser à un sondage que j’ai entendu ce matin, et où il était dit que les Français étaient les plus pessimistes des européens quant à l’avenir de leur pays (derrière l’Islande et la Roumanie)
    Bon, l’Islande a envoyé chier le FMI, et ces créanciers, et comme c’est pas un « grand » pays, on lui fera pas de cadeau…quant à la Roumanie je vous laisse lire
    http://www.lemonde.fr/depeches/2010/05/22/roumanie-le-fmi-a-suggere-des-hausses-d-impots-pour-limiter-le-deficit_3214_236_42522345.html

    [je comprends pourquoi j'ai fait l'association d'idée du coup]

    Mais comme DSK l’a dit et répété : le FMI conseille, suggère, mais jamais au grand jamais n’impose ! ce sont les gouvernements qui décident d’appliquer telle ou telle mesure…pffffff….
    enfumage ! #démocratie blabla

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  15. lediazec

    27 mai, 2010 à 19:36

    @ Laetsgo. Alors ce week-end, le Finistère ou la Normandie ? Content de te relire. Ton mec n’a pas tort. Si nous devions frôler l’infarctus à chaque interlope, entendue et subie, le monde serait un grand cimetière. Passes-lui le bonjour de ma part à ce philosophe.
    Strauss-Kahn ? Une grosse merde sous le pied droit de la gauche, voilà ce que je pense à son sujet. Bises du soir.
    Quelle journée !

    Dernière publication sur Kreizarmor : Place Vendôme, haut lieu de l'indécence

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  16. gersouille

    27 mai, 2010 à 21:17

    Le problème avec DSK se trouve dans l’échec.
    - Maire de Sarcelles, il n’a pas réussi à changer le destin des quartiers difficiles. Détruire des tours sans prévoir le relogement est un non-sens pour tout militant de gauche.
    - En tant que ministre éphémère de l’économie (un faux rapport l’a envoyé en justice), son fait d’arme reste la législation avantageuse sur les stocks options.
    - Comme président du FMI. Euh, il n’y a pas grand-chose a ajouter vu le merdier dans laquelle la finance mondiale met le monde en situation plus que délicate.
    - Comme candidat à la dernière présidentielle, il est reparti la queue entre les jambes, sévèrement battu par une bonne dame limite idiote (qui pourtant met en place dans sa Région une vraie politique innovante, moderne. La seule proposition nouvelle à ce jour).
    - Comme individu, il aura du mal à convaincre la gente féminine de sa capacité à gouverner sans utiliser ses avantages afin de soulever la moindre jupe qui passe à proximité.

    Finalement ce beau monsieur (pas si beau d’ailleurs), a déjà un poste de chef d’état grassement rémunéré. Pourquoi risquerait-il de perdre ce statut pour aller à l’aventure dans une primaire à gauche, qu’il est dans l’incapacité de gagner vu les griefs que l’on voit surgir de partout. Si, il choisit d’y aller. c’est qu’il est vraiment c..

    Cordialement

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  17. clarky

    29 mai, 2010 à 15:50

    vous excitez pas les ruminants, on va repartir pour 5 ans de max la menace, c’est notre petit cheval blanc à nous, tous derrière et lui devant ;)

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