Le cul entre deux chaises, longtemps après sa mort, de Gaulle est au centre d’une polémique dont l’importance lui échappe.
Une polémique bidon, comme le milieu en a l’habitude quand il s’agit de combler un vide. Vacuité de l’époque, l’homme du 18 juin 40 est-il digne de figurer au programme du bac littéraire ?
La chose soulève de la poussière et fait cracher beaucoup de salive dans les couloirs.
C’est en novembre 2009 que des inspecteurs nationaux et régionaux de l’Éducation nationale réunis à Paris pour choisir quatre écrivains et quatre livres pour le programme du bac L ont l’idée, après Homère, Beckett et Pascal Quignard, de choisir de Gaulle et ses Mémoires de guerre.
Pourquoi pas après tout ? Si vous voulez faire du mal à un auteur, faites-le figurer dans la liste des auteurs officiels. Il deviendra aussitôt un être horrifique pour des millions de futurs citoyens.
Mais la question demeure : le grand Charles est-il digne de figurer au programme du baccalauréat littéraire ? Des professeurs de lettres – aussi soucieux que sourcilleux – ont lancé une pétition pour s’insurger contre l’étude des « Mémoires de guerre », à cause d’une erreur de rayonnage. « Oui à l’histoire, non à la littérature », clament haut et fort les opposants à ce choix plus idéologique que littéraire.
Quelle chienlit !
C’est la guerre. Le pays creuse déjà les tranchées et l’industrie du cercueil est submergée par les commandes. On s’attend à des milliers de morts !
Il y aurait-il des bonnes et des mauvaises guerres ?… Tout comme il existe des bons et des mauvais écrivains ? Il y aura-t-il désormais des bons et des mauvais morts ?…
Le débat fait rage et l’imminence d’un affrontement sanglant est inéluctable.
remi begouen
4 juin, 2010 à 11:35
Je suis loin d’être gaulliste, surtout depuis mai 68…et même depuis l’armée (60-62), dont l’Algérie. Je l’ai été, jeune homme, en réaction contre mon père resté nostalgique de Pétain (il y en a encore…) et je lisais donc du De Gaulle en sa présence. Un jour, il m’a emprunté clandestinement mon bouquin et – en bon amateur de littérature française – il est devenu peu à peu gaulliste, surtout depuis mai 68 !
Ainsi évoluent lentement ou vivement les opinions, autour des évènements politiques et de leurs auteurs importants. Surtout, et c’est rare, lorsque l’auteur est un écrivain digne de ce nom, ce qui est la cas du Grand Charles. J’apprends par le lien de l’article que Churchill a eu le prix Nobel de littérature alors qu’il avait ’50 nègres à son service, alors que De Gaulle, qui rêvait de ce prix, aurait tout écrit lui-même…
Bref, quelques soient les opinions politiques, les Mémoires de Guerre sont de la bonne littérature, comme du Chateaubriand…
Et du lediazec!!!
babelouest
4 juin, 2010 à 12:22
J’ai encore son petit ouvrage, « Vers l’armée de métier ». Bien que légèrement technique, c’est une œuvre lumineuse et simple à lire, un régal. Cet homme mérite d’être étudié en littérature, au moins autant que certains autres. Pour les actes dont il est l’auteur, il y a du très bon et du nettement moins bon. Mais comme ici nous parlons de littérature….
lapecnaude
4 juin, 2010 à 13:27
Cà risque de faire caguer les intégristes lefebvriens …
b.mode
4 juin, 2010 à 13:34
J’aimais bien l’éloquence emphatique de de canne à pêche comme dans ce discours de 58 où « moi même et mon gouvernement » présente la sinistre cinquième. La mise en scène qui précède le discours que je n’ai malheureusement pas retrouvé montre l’arrivée de la DS noire présidentielle qui entre en scène après l’ouverture d’un gigantissime rideau noir ! Du grand théâtre ubuesque ! http://www.youtube.com/watch?v=ywdfHSCZJpw
lapecnaude
4 juin, 2010 à 15:36
La suite pour moi a été moins drôle, chargée du vote dans ma commune algérienne, il m’a fallu crapahuter sec pour établir des listes électorales correctes… rigolez, mais S.N.P. Mohamed ben Larbi et S.N.P. Mohamed ben Ahmed c’est pas pareil, même s’ils ont le même burnous crasseux et la même gueule pathibulaire, sans oublier les noms patronymiques par douars entiers (4 à 5 villages ou mechtas). Les faire voter, hommes et femmes sous la contrainte (fictive, la montagne avait des yeux) et s’appercevoir que les urnes étaient déjà préparées d’avance !
Bon après, je me suis quand même régalée avec « le quarteron de généraux en retraite », le spectacle était devant la télé, tant de képis sur des mines constipées …
clomani
4 juin, 2010 à 16:37
De Gaulle, pour moi, c’est la littérature de « papa »…
Mon père avait tout De Gaulle dans sa bibliothèque… une partie lui avait été donnée par mon patron d’Europe 1 qui avait reçu les dernières parutions en service de presse et, apprenant par moi que mon pater était lecteur du Grand Charles, les lui a transmis par mon intermédiaire.
En échange, j’allais à Genève acheter des cigares chez Davidof (il me donnait l’argent pour ça, j’étais trop fauchée à l’époque).
Donc j’ai contribué à une sorte de trafic entre la France et la Suisse : les bouquins de De Gaulle à mon père contre des barreaux de chaise de chez Davidof pour mon patron.
Mais je n’ai jamais lu De Gaulle. En seconde commerciale, je m’entraînais à prendre ses discours en sténo… il avait une diction parfaite ;o).
lapecnaude
4 juin, 2010 à 20:41
Il a toujours écrit, bien avant 58 à part ses voyages du mercredi à Paris, il avait le temps. On doit au moins en lire un bout pour connaître, moi j’estime qu’il est bien plus justifié pour le bac que certains.
lediazec
4 juin, 2010 à 21:25
Au final, les amis, les vrais gaullistes, les vrais anti-sarkozystes, c’est nous ! Les résistants de toujours !
A bas les nains ! Vive le Grand Charles.
Au moins lui, il savait écrire ses discours !
Quand la France est en danger, toujours les mêmes qui se font fusiller !
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clarky
5 juin, 2010 à 0:45
me parlez pas du bac, j’en ai chié grave pour l’avoir, faut dire que je forçais pas des masses à l’époque
mais véridique, ma prof de sciences nat s’appelait madame thébault, une bombe et elle le savait en plus la garce, elle en jouait, je crois bien que j’ai jamais lu de gaulle mais je l’ai eu en fantasmant sur madame « t’es belle » comme on la surnommait en loucedé…
bon je sais, ça n’a strictement rien à voir avec le sujet mais je savais pas quoi écrire, certains me répondront « ben t’avais qu’a fermer ta gueule ducon !!! », pas faux
lapecnaude
5 juin, 2010 à 3:30
T’inquiètes, moi je l’ai pas eu, faut dire que j’étais allergique à deux choses : internat et filles, alors les deux ensembles … me suis barrée à trois jours de l’examen, que je ne n’aurais certainement pas eu. J’ai pas de remords.
Cà va Laurent ?
clomani
5 juin, 2010 à 9:34
Clarky, La Pecnaude,
Moi je l’ai eu en 68… dans le bordel ambiant à Annemasse, z’ont même pas pu organiser les épreuves du BSEC (BAC G actuel). Z’ont calculé la moyenne de l’année, sans coefficient en plus. Comme j’étais plutôt nulle en compta et organisation de bureau, c’est la philo, le français et les langues étrangères, et ma rapidité en sténo/dactylo qui m’ont sauvée.
clarky
5 juin, 2010 à 11:49
@françoise on fait aller françoise, la cigarette m’aide à passer mes nerfs, la semaine prochaine va être particulièrement spéciale…
clomani
5 juin, 2010 à 15:43
à Clarky,
Ne sachant pas ce que tu « fais aller », je t’apporte juste un peu d’empathie et de soutien moral…
Bon courage…
lediazec
5 juin, 2010 à 16:36
Ben, moi, les enfants, 68, le bac et tout le tintouin m’est passé dessus comme une bizarrerie pittoresque. Cela faisait trois mois que je résidais en France venant du Maroc espagnol. Je ne parlais pas le français. Je voyais bien à la télé que ça bardait à Paris (j’étais à Saint-Étienne en internat), voitures brûlées et castagne. Mais qu’est-ce que c’est que ce pays foireux que je me disais. Je pensais que pour un mec qui avait un si grand pif, le grand Charles manquait de nez, plus personne n’avait l’air de bien le sentir…
Après il y a eu un référendum et Charles est parti un peu tristouille en remuant du mouron en Irlande avec sa Simone.
Ensuite… Ensuite… Bâtiment, peinture, bringue, l’Espagne, l’anti-franquisme, le militantisme et la Bretagne.
Voilà pour mon bac.
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babelouest
5 juin, 2010 à 17:07
Bof…. ayant suivi le lycée tout en bas des Pays de Loire, j’ai naturellement passé l’écrit sur place. Pour l’oral, que passaient uniquement ceux qui avaient eu l’écrit, il était déjà regroupé à Nantes, alors que les régions n’existaient pas encore.
Je ne vous fais pas de dessin (pas doué du tout), il faut imaginer un pauvre gamin à peine sorti de ses champs, un cul-terreux, prenant le train pour la première fois. Mon père avait pris la voiture, pour m’emmener à la gare non la plus proche, mais la moins compliquée en raison des réseaux qui s’accordent mal. Cinquante kilomètres, pour rattraper un omnibus dans une petite station de campagne. Cent autres dans ces trains anciens, fatigués, qui avaient sans doute connu la guerre.
Arrivé dans la métropole régionale, je hèle un taxi (c’était bien entendu la première fois que j’en prenais un), et je lui indique le lycée Victor Hugo, où se passent les épreuves. Il m’assure qu’il ne le connaît pas. Il cherche dans ses agendas et plans…. enfin il trouve ! C’est en pleine ville, juste en face du Palais de justice, là où a eu lieu une prise d’otages très médiatisée. Il me dépose enfin. Je suis persuadé qu’il m’a bien promené.
Je me retrouve seul, et plutôt désemparé, à l’époque je suis très timide, apeuré et pas du tout sûr de moi. Enfin je rencontre un de mes camarades de classe, avec sa famille au complet, très chic, très impec, bien dans sa tête. Sa mère m’offre un café à l’établissement juste devant le lycée. Nous y allons enfin. Bien entendu je rate mes prestations, complètement sur les nerfs. Comme il est tard, plutôt que de rentrer le soir même je dois rejoindre des parents éloignés qui vivent dans un HLM, dans la banlieue. Re-taxi, re-interrogation et perplexité du susdit, qui ne connaît pas ces nouveaux quartiers. Nous perdons pas loin d’un quart d’heure à démarrer, et sûrement dix minutes à louvoyer parmi les tours toutes semblables. Enfin il me dépose en bas de l’immeuble. Je dois attendre devant celui-ci que mes cousins rentrent du travail. Je ne vous dis pas en quel état je suis, quand enfin je les vois arriver !
J’ai passé le rattrapage en septembre, et là je l’ai eu. C’était en 1967. Quelques mois plus tard, c’est en tant qu’étudiant que j’ai vécu mai 68 « de l’intérieur ».
clarky
5 juin, 2010 à 23:37
bah merci clo
remi begouen
6 juin, 2010 à 1:12
C’est bizarre, mais cela nous ressemble sans doute, de passer du ‘Grand Charles’ au ‘petit bac’.
Une dernière anecdote sur la route (de l’époque)? :
Je n’ai pas le bac. J’étais pourtant bon en anglais, mais il m’a pris le coup de folie de rendre ‘copie blanche’…car j’avais rdv avec une anglaise dont je connaissais la langue personnelle !
Je fis donc une pénible école technique (58-60) puis un très pénible service militaire(60-62). Puis enfin un vrai beau boulot de technicien en cartographie (63-65) terminé par licenciement, suite aux grèves dont j’étais un ‘pilier’…
Le coup de pot a été ma réussite à un examen d’entrée spécial pour non bachelier à l’Université, assorti d’une bourse (d’un organisme catholique à qui je n’avais rien demandé!), certes inférieur de moitié de mon salaire, mais qui m’a permis (65-67) de devenir activiste de l’UNEF. Avant, sans diplôme, de revenir à un boulot technique, cette fois en imprimerie. Puis il y a eu Mai 68, dont je suis ‘diplômé’ : cela vaut bac+++++, non, du moins pour tant de gars et de filles qui n’ont jamais, comme moi, renié ces temps et ces valeurs, contrairement aux quelques un(e)s, par ailleurs ‘super diplomés’…beurk!