Paul Michel AUDIARD est né à Paris en 1920, auteur, réalisateur et dialoguiste (120 films portent sa marque pour l’une ou l’autre des activités souvent les trois à la fois), il a écrit 10 livres, « La nuit, le jour et les autres nuits » est son dernier. Écrit en 1978, trois ans après le drame qui l’a profondément affecté, la mort d’un fils. Ce livre annonce rien moins que la fin d’un monde, il devait s’intituler initialement « En écoutant craquer la banquise », titre étrangement prémonitoire qui devrait devenir important dans la vie de quelques snobinards qui ne voient le plus souvent Audiard qu’au travers des « Tontons Flingueurs » et autres de ses films.
Michel Audiard n’aura donc pas été QUE le plus grand dialoguiste du cinéma français . Il n’aura même pas, avec ce livre (qui fut son dernier) atteint ce fameux statut d’écrivain. Non il aura simplement été une être humain qui, dans la brève parenthèse de son passage sur terre, a écrit un texte à la fois bouleversant, hilarant, dérangeant, plein de tendresse, d’amitié, de fidélité, lucide, provocant, violent, d’une profondeur infinie (dans la désespérance, mais aussi dans la vérité d’un être), un texte dont on sort percuté, cabossé qu’on ne peut oublier dans un coin de bibliothèque.
Dans « la nuit » Audiard délimite son territoire natal, il n’est pas parisien, il est « du XIV° » et seulement de là, il fait même exception de l’avenue d’Orléans ! Il en parcourt chaque nuit les rues, les squares, avec à chaque fois des souvenirs. Il s’arrête et le cinéma se met en marche dans sa tête. Au fil des errances il croise des statues, il ne les aime pas toutes, celle du Lion de Belfort par exemple « Sur la question de l’éclairage, on a toujours été un peu en retard, ce qui offre quand même une compensation, on ne voit pas trop le Lion de Belfort, une crapulerie de bronze à laquelle je ne m’habituerai jamais. »
Il se considérait comme un manard de la PME cinoche, une petite main, un exécutant, un cordonnier du 7ème art à qui on apportait des godasses scénaristiques de qualité douteuse afin qu’il leur cloue des mots, leur pose des semelles là ou il faut, et qu’elles marchent une fois mises en marche en ce qui leur fait office de boite (en franglais box-office), « Voici vingt ans que je m’emmerde à écrire des trucs pour gagner des sous, pour ne pas devenir assassin« . « J’ai arrêté de picoler quand je me suis aperçu que j’écrivais le même film depuis dix ans sous différents titres. Personne ne l’avait remarqué,. J’aurais pu continuer. Oui, au fond, j’aurais pu…«
Ses soit-disant réussites, il les juge avec plus de sévérité que le pire de ses détracteurs (Truffaut, le grand précurseur du cinéma coincé du croupion). Pour lui, le grand cinéma c’était Eisenstein. Comme la grande littérature, c’était Céline et Proust. Des fausses grandeurs il y en aura plein le XX° et le XXI° siècle, Molière se serait régalé, mais Molière n’est plus là et Audiard était le dernier de la lignée. Cet esprit français là ne sera plus bientôt qu’un souvenir :
« Je n’ai pas du tout l’esprit à jouer … un certain temps déjà que je ne joue plus … à rien … depuis qu’une auto jaune a percuté une pile de pont sur l’autoroute du sud et qu’un petit garçon est mort… (…) Pour le reste … je mange ma soupe … je m’habille …je me déshabille … je fais des trucs intéressants comme de me raser … de vider les cendriers …voyez des occupations« . Indifférence absolue de l’existence de cette ménagerie humaine qui l’entoure et soudain « Imaginer huit cent millions de jaunets se faisant roussir la couenne n’est qu’une démangeaison sensorielle de l’immense panard que la Super-Super nous promet : l’aube enchanteresse où la fusée porteuse larguera l’ogive qui piquera, dans un hululement de chouette hystérique, sur quatre milliards cinq cent millions d’enfoirés. J’en bégaie de bonheur de les imaginer, exorbités de pétoche, béants de conneries, dans « l’éveil jaune et bleu, des phosphores chanteurs », lorsque l’ultime et colossal champignon les aspirera avec leurs cosy-corners, leurs scènes de ménage, leurs récépissés de Caisse d’Épargne, leurs problèmes sexuels, leurs tickets de tiercé, leurs prostate, leurs machine à laver, leurs transistors ! … Quatre milliards cinq cent millions de têtes de cons qui cesseront enfin de polluer le système solaire ! … »
De l’anti-Hulot quoi !
Car Audiard a une conviction terrible, les gens capables de tout, d’un peu de bien certes, mai aussi de vénalité et surtout de toutes les turpitudes, toutes les horreurs, absolument toutes. Jeune, il a vu, lui, au lieu de la grande fraternisation des livres d’histoire, il a vu l’ignominie surgir au coin d’un ordre lancé par quelques résistants de la 11ème heure (comme on aime dire). Certains ont morflé, certaines encore plus (s’attaquer aux faibles est un acte de résistance pour ces gens) parce qu’une pointe d’humiliation des femmes est toujours bonne à prendre dans les défoulements barbares, ce sont quand même les mêmes neuropeptides qui commandent l’envie de sang et l’envie de sexe. Le point de fixation d’Audiard c’est Myrette, son amie, avec qui il faisait l’amour par amitié, par tendresse, elle lui a appris à jouer du banjo. C’était une fille facile, pas trop regardante sur la provenance nationale de ses clients.
A la Libération, un certain colonel Palikar a trouvé judicieux d’aller, avec quelques assoiffés de fausse vengeance, mais surtout de sexe et de sang, lui faire son affaire, et là Audiard est précis : « Myrette fut certainement très martyrisée puisqu’elle avait les jambes brisées lorsqu’ils la tirèrent par les cheveux sur la petite place et l’attachèrent au tronc d’un acacia. C’est là qu’ils la tuèrent. Oh ! sans méchanceté, plutôt, voyez-vous, à la rigolade, comme on dégringole les boites de conserves à la foire, à ceci près : au lieu des boules de son, ils balançaient des pavés. Quand ils l’ont détachée, elle était morte depuis longtemps déjà, aux dires des gens. Après l’avoir jetée sur un tas de sable ils lui ont pissé dessus, puis s’en sont allés par les rues pavoisées pour, comme on dit, arroser çà. Quelle merde ! On a vu des tontes de femmes, des pendaisons de (supposés) collabo, des concours d’extraction dentaire par claquage de gueule. »
Depuis ce son et lumière de l’été 44 Audiard ne se fait plus aucune illusion sur les gens et surtout sur les Français – poivrots, combinards, délateurs, lèche-train, anonymographes. A lire ces lignes en 78, on se rend compte en 2010 qu’ils n’ont pas changé sinon en pire. Le destin fut clément avec la justice immanente puisque Palikar chuta incidemment sous les chenilles d’un char Sherman, juste devant la boutique du coiffeur qui avait rasé le crâne de Quenotte, une autre amie, et juré Bébert n’était pas là.
Depuis, il a gardé le banjo de Myrette, il l’a suspendu dans son couloir, chez lui. Il n’y a pas eu que Myrette, il y a toute une suite qui défile dans la substance grise qu’il déverse sur le papier. Quenotte, rapport à sa virtuosité dans la fellation, Sophie Clodomir lesbienne gourmande devenue sur le tard bovidé peu remuante sans cesse baignant dans ses bains d’algues vertes et broutant ses salades de régime, Sucette à l’académie Terpsichore, Hortense passée de la collaboration à l’épuration sans prendre le temps de changer de culotte, sa fille Raymonde ….
Raymonde qui donne à Audiard l’occasion des quelques pages « légères » du livre, quand il raconte sa manière sournoise de l’avoir possédée dans l’eau, alors qu’ils se baignaient au Tréport, en août 39, en lui faisant fallacieusement miroiter les pires cauchemars si les allemands remportaient la mise : « Là dessus, je suis parti dans une adaptation très libre des évènements d’Autriche, de Bohême, ajoutant plein de viols de religieuses que j’avais lu au moment de la guerre d’Espagne et qui faisaient parfaitement l’affaire. En hypocrite, je commençais à me branler dans l’eau, pour pas qu’on voit de la plage, parce que ce n’était pas un spectacle pour les enfants. Je brossais en traits appuyés la volée que l’on n’allait pas nous manquer de se prendre si on se mêlait de ce qui ne nous regardait pas à Dantzig, que les Allemands brûleraient Paris, que les Françaises finiraient dans les bordels nazis, et que, de toutes façons, on ne verrait rien de tout çà puisqu’on serait fusillés. Çà marchait bien. Elle fait glisser, en se tortillant, son slip à fleurs jaunes sur ses chevilles et a passé ses bras dorés autour de moi. « T’as raison, on va sûrement mourir ! convint-elle. Vas-y ! Ce fut un moment rare et çà reste un grand souvenir. Je l’ai pinée, comme çà, dans une eau à même pas quinze degrés ! Un pareil exploit aujourd’hui m’extasie« .
Il leur rend souvent visite au cimetière de Montrouge et leur raconte la vie tout en fleurissant leurs tombes.
Même s’il affirmait qu’il s’employait dans ses livres à ne rien écrire qui puisse être réutilisable dans un film, où serait l’acteur, le héros audiardesque qui arriverait à dire avec le juste ton à propos de la relève des miliciens FFI – « un type qui porte un brassard est toujours une ordure, sauf s’il est en deuil. Un type qui porte un béret basque est toujours une ordure, sauf s’il est basque. Et voilà que les voitures à brassards succédaient aux ordures à béret ! Çà recommence bordel de merde ! «
Quelle était la couleur des yeux de Myrette ? La partie centrale du live est occupée par une lente dérive nocturne, dont une part en Rolls, celle de Paloma De Sweert, née Bachu, comtesse au cul moult fois honoré et pour le coup cousu d’or, qui se targue de culture, conduite par Mehdi dit « le bic » puisqu’Audiard a le goût de se rendre aimé par les gens de gauche, Mehdi figure ancillaire, qui doit accepter les assauts sodomites du mari de la comtesse, toujours si l’on en croit Audiard, qui n’en est pas à une provocation près, ayant décidé de faire « chier » sous le prétexte d’aller chercher des cigarettes. Ce trio improbable va rouler rive gauche, de Montsouris au Panthéon (dont la description sous les traits d’un temple stalinien vaut à elle seule tout le livre. Ils larguent l’emperlousée et passent rive droite, remonte jusqu’à Pigalle. A cette heure-ci, pourquoi Pigalle vous tombe dessus comme un vieux tapis de chien ! Le Bic Mehdi raconte ses histoires de guerre d’Algérie : « qu’est-ce que j’en ai à foutre ? « , « Cerné, tel est mon lot depuis la maternelle rue d’Alésia, jusqu’au studio de Billancourt en passant par les bons pères, les flics, les adjudants, les contremaitres, les balluchonneurs, les funambules du clair de lune, qu’est-ce que j’ai pu remorquer comme imbéciles ! Leurs Livre d’Or ! Ceux qui valaient quelque chose sont partis. Cause à qui ? Je ne peux parler qu’aux morts. Alors je parle aux cons ! – Ils se quittent, Mehdi rentre. »
Arrivé au parc Montholon, il rencontre Maugréant, un habitué des bancs. Il pue, mais est de bonne conversation et a des bancs – en habitué – Audiard tracte la possession d’un banc pour plus tard. Audiard, lui, son destin, il le voyait sur un banc : « je les repère depuis des années …les bons endroits … pas trop ensoleillés, ni venteux … j’ai une option sur un banc du Trocadéro … sous un arbre de Judée … vers mai, c’est joli, çà fleurit bien … en perspective de l’été, j’en ai débusqué un autre, tout à fait ombragé, aux Tuileries, mais en pierres … gaffe aux hémorroïdes. «
Et ce filament noir qui court au long des pages, cette sortie d’autoroute du sud l’avait un peu sorti de la vie. Quand ce fils était hospitalisé, il lui disait : « tu sais, tu peux rester encore une peu« . Avec l’instinct peureux de ceux qui savent bien ne plus intéresser personne, qui appréhendent la nuit qui commence à descendre derrière les croisillons et qui savent qu’ils vont rester tout seul à interroger la petite veilleuse bleue jusqu’au matin où l’infirmière viendra avec ses pilules et les potions à rendre la vie gaie, les euphorisants comme on dit.
L’hôpital occupe de plus en plus de place dans le texte quand Audiard se fait interpeller par Aristide, le patron du bistrot « chez l’Ancien », celui qui raconte sans cesse le déraillement du train où ont péri sa femme et son fils, il en fait des cauchemars : » Y s’en passe des choses, Y s’en passe, Nanar a pété un boyau dans la tête ! » – « Pas possible, Nanar, je l’ai rallumé cette nuit Métro D’enfer, il était normal !). Nanar, celui du couple de clodos le plus crado de Paris, errant depuis 35 ans à la recherche du 18 bis rue Billancourt , immeuble extrait de la rue par une bombe comme une vulgaire dent pourrie en 44, et dans lequel ils avaient tout de même laissé à la nourrice leur seul petit garçon et qui finit son épouvantable destinée entre quelques tuyaux bien propres, aseptiques même, du service de réanimation de l’hôpital Cochin. Audiard a quelques réflexions sur l’hôpital « J’ai découvert peu à peu (l’inexorable déglingue de mes proches entraînant une fréquence de visites) la vénéneuse supercherie florale de l’Assistance Publique. Les cinéraires de Montrouge ne sont pas chimériques alors que les géraniums de Cochin ont un côté trompe-l’œil dans leur façon de faire accroire que le mal suit le cycle des saisons et que, par conséquent, les cancéreux vont se rebecter aux premiers bourgeons.«
De toute façons Audiard n’a guère d’illusions sur l’intérêt qu’il suscite, sur le plan professionnel, amical et amoureux. il a notamment une phrase en parlant de lui : » D’un abord agréable, je lasse rapidement. Je déplais aussi vite que j’ai plus. Comme les baigneurs qui bronzent trop vite, çà s’en va. «
Il y a encore tant et plus à écrire sur ce livre, ses personnages, sur Audiard la tendresse …. que je vous envie de le lire, moi , je vais encore le relire.
babelouest
29 août, 2010 à 6:34
Miam ! La Pecnaude nous entraîne vers un livre non pas culte, mais indispensable, comme l’air du temps qu’on respire, et le temps de l’air qui soupire.
b.mode
29 août, 2010 à 8:45
J’ai lu qu’Audiard dans les années 50 avaient écrit des polars dans le genre de San antonio. Mais ils n’ont jamais été réédités et je n’ai jamais pu en trouvé un en bouquinerie. Quelqu’un en a lu ?
lediazec
29 août, 2010 à 8:49
Ca c’est de la note de lecture, pute vierge ! Magnifique. Je m’en vais me procurer ce grimoire sans plus tarder.
Merci Françoise. Franchement superbe.
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babelouest
29 août, 2010 à 8:58
Je n’en ai pas lus, Bernard, mais chez Chapitre.com on en trouve en occasions.
b.mode
29 août, 2010 à 9:21
Merci Jean-Claude, je vais aller voir ça !
b.mode
29 août, 2010 à 9:29
Oh purée méfiez vous des blondes à 135 euros, ça fait cher le fleuve noir !
clomani
29 août, 2010 à 9:45
Vingt dieux, Pecnaude, si les librairies étaient ouvertes aujourd’hui dimanche, je serais allée illico essayer de trouver le bouquin !
Superbe critique de bouquins !
Du coup, les futurs prix Goncourt vont avoir un goût de BHLerie ! (m’en fiche, j’en ai rarement lu).
Eh, les mecs, une question… arriver « à piner » dans une eau à 15°, ça doit être comme un Everest nan ?
lediazec
29 août, 2010 à 9:47
J’ai fait ça Clo. C’est très chaud et c’est très froid. C’est…
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b.mode
29 août, 2010 à 9:52
Moi aussi je l’ai fait mais dans une eau chaude ! c’est bien !
clarky
29 août, 2010 à 10:19
sarko aussi le fait, il nous pine tous les jours !
ben mitou je l’ai fait, aux saintes maries avec plein de gens autour, et je confirme, c’est le panard, sauf que j’ai jamais pu retrouver mon maillot …
Didier Goux
29 août, 2010 à 10:20
Excellent livre, en effet, lu et relu depuis une vingt-cinquaine d’années. Je suis ravi de voir qu’un anarchiste « de droite » puisse trouver grâce à vos yeux, tout n’est pas perdu !
lediazec
29 août, 2010 à 10:32
Salut Didier. Comment ça va la forme ? Elle gite toujours vers la droite, à ce que je lis. Provocateur tu étais, idem tu demeures !
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piron
29 août, 2010 à 10:35
A ma connaissance
Publié en 1978 chez Denoël puis en folio (n°1201) fin 1980 ,ce très grand livre du « petit maître » est malheureusement épuisé depuis des années.
clarky
29 août, 2010 à 10:59
on doit certainement le trouver chez les bouquinistes, mais ça doit couter un bras…autant dire que faut être de droite et oublier son penchant anarchiste.
chez les audiard, le fils a également un talent remarquable
« la grandeur de la gauche, c’est de vouloir sauver les médiocres. sa faiblesse, c’est qu’il y en a trop ! » j’avais adoré ça quand je l’avais lu
(‘ttention, c’est pas du vieux de la veille ).
Didier Goux
29 août, 2010 à 12:04
Je possède ce livre et veux bien le faire circuler parmi les Ruminants que ça intéresseraient de le lire. Il suffit pour cela de me donner une première adresse par mail privé, puis de faire circuler le livre entre vous ensuite.
Didier Goux
29 août, 2010 à 12:07
Lediazec : Audiard n’était pas de droite à proprement parler (mais encore moins de gauche, tout de même…), c’est pour ça que j’ai rajouté « anarchiste », bien que la formule me laisse insatisfait. Ce qui est certain c’est qu’il n’avait aucune illusion sur la nature humaine, ce qui est plutôt une caractéristique des gens dits « de droite ». En fait, la personne la plus proche serait probablement Céline. Ou Marcel Aymé. Toute question de talent mise à part bien entendu. Car Audiard n’est tout de même, comme l’a dit quelqu’un plus haut, qu’un « petit maître » – ce qui n’est nullement déshonorant, du reste.
lapecnaude
29 août, 2010 à 12:11
Didier Goux – rien n’est perdu, puisque je vous lis !
b.mode
29 août, 2010 à 12:13
Didier, c’est très sympathique (voir plus) de votre part mais je pense qu’il a été réédité. http://www.amazon.fr/gp/product/2207108643?ie=UTF8&tag=entreguilleme-21&linkCode=as2&camp=1642&creative=6746&creativeASIN=2207108643
lapecnaude
29 août, 2010 à 12:30
chez Price Minister :
Priez pour elle (Fleuve noir 1950) – rien
Méfiez-vous des blondes (Fleuve Noir 1950) – 45 euros.
Massacre en dentelles (Fleuve Noir – 1952) – rien
Ne nous fâchons pas ( Plon – 1966) – 80 euros
Le terminus des prétentieux (Plon – 1968) – 60 euros
Mon petit livre rouge (Press Pocket – 1969) 25 euros
Vive la France ( Juillard – 1973) – 12,50 -13,90 -17,74
Le petit cheval de retour (Juilliard – 1975) – 13,50 euros
Répète un peu ce que je viens de te dire (juillard – 1975) – 13,00 – 38,00 euros
La nuit, le jour et toutes les autres nuits (Denoël – 1978) – 7,65 euros
Voilà ce que j’ai trouvé, mais vous pouvez aller aussi chez amazon, chez Price Minister je les reçois en trois, quatre jours maximum.
b.mode
29 août, 2010 à 12:42
Putain ne nous fâchons pas, je savais même pas que ça existait en bouquin ! le film est absolument géant ! j’en ai parlé là : http://ruminances.unblog.fr/2010/03/10/ne-nous-fachons-pas/
lapecnaude
29 août, 2010 à 12:43
Je précise que « La nuit » vient de sortir en réédition, j’avais lu Audiard en mon jeune temps, mais sans souvenirs très précis. Dans ce livre, ce qui m’a fait « zihrr » c’est que l’intensite mélancolique et désabusée qu’il donne de cette époque (la libération) est très semblable à celle qui commence à tous nous étreindre en ce moment, cette impression de dégoût et ce retours à l’amitié simple et naturelle, sans calcul.
clomani
29 août, 2010 à 12:51
Moi c’est anarchiste de droite qui m’agace. Qu’est-ce que ça veut dire puisque les anarchistes refusent d’élire leur oppresseur, qu’ils soient de droite ou de gauche.
Avoir une vision crue de l’existence, ça doit être être anar de droite… et une vision angélique et très sociale anar de gauche ? Ca existe, des anars du centre ?
L’amertume n’est ni de droite ni de gauche, elle fait partie de la lucidité des anarchistes de tous bords qui refusent de s’en laisser conter par qui que ce soit, et surtout d’entrer dans les cases bien cadrées et bien « petites » où on nous force à rentrer depuis plus de 20 siècles !
Ch. Romain (Nanterre)
29 août, 2010 à 13:09
Superbe texte, bravo !
Dans le même esprit que ces mémoires d’Audiard, et contemporain (ils se sont croisés au Fleuve Noir), on peut conseiller celles de Frédéric Dard (San-Antonio) intitulées « Je le jure », un recueil d’entretiens où l’on verra que l’épuration à Lyon n’a pas été beaucoup plus reluisante qu’à Paris…
Fifi d'Ardèche
29 août, 2010 à 14:49
Tu as une écriture magique , Lapecnaude ….C’est un vrai plaisir de te lire!
Pour ma part, je veux vraiment croire que notre société est devenue meilleure , que les gens refuseraient de réagir avec la même cruauté et la même bêtise qu’à cette époque-là…
b.mode
29 août, 2010 à 15:04
Sur l’anarchie de droite, je pressens ce que veut dire Didier et j’avoue qu’elle ne me laisse pas insensible au niveau de l’écriture. Céline, Audiard voire Blondin ou Nimier pourquoi pas Gainsbarre, tous ces gens là me séduisent par leur plume, leur style et leur regard sur les gens…
Je préfère lire cela que du BHL, Sollers etc… Je trouve même Daeninckx parfois un peu lourd.
J’adore Manchette cependant ! Et pis, j’ai même ri à certains romans d’ADG… c’est dire…
Didier Goux
29 août, 2010 à 15:47
J’ai bien précisé que cette expression, « anarchiste de droite », ne me satisfaisait pas. Pas du tout, même. Mais je dois avouer que je n’en trouve pas d’autre pour tenter de définir ce type d’hommes (à ceux cités par B.mode, on pourrait rajouter le délicieux Kléber Haendens, qui fut en quelque sorte le « maître » des Nimier, Blondin, Geneviève Dormann et d’autres).
Didier Goux
29 août, 2010 à 16:01
Haedens, pardon…
lediazec
29 août, 2010 à 18:25
@ Didier. Oui, moi aussi, ça m’énerve l’appellation d’origine très contrôlée d’anar de droite. J’ai déjà dit quelque part que ce n’est pas parce que Bergman, anarchiste suédois, avait écrit que « les anarchistes étaient les aristocrates de la classe ouvrière » qu’il fallait en détourner le propos en lui flanquant le quolibet « anarchiste de droite ». Pareil quand on dit anarchiste-libertaire, formule très prisée chez les malins pour créer la confusion. A mon humble avis, on est anar ou on ne l’est pas. Le reste c’est une maladie infantile qui n’a rien à voir avec le propos ou la racine du terme.
Je suis anarchiste, point. Ensuite, entre anarchistes, les avis divergent et c’est très bien ainsi.
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lapecnaude
29 août, 2010 à 18:56
J’essaierais bien de vous mettre d’accord, nous sommes tous des anarchistes, nous sommes obligés de reconnaitre et de définir un ensemble de lois pour pouvoir vivre ensemble sans se bouffer le nez, mais en vérité ce n’est que contraints et forcés, car fondalement l’humain est unique et le reste ne sont que des répliques.
Quand j’ai lu la triste fin de Myrette, je n’ai pu m’empècher de penser à la douleur qu’avait subie Rémi dans son enfance quand son ami a été tué, on en reste transformé avec un sentiment de colère et de haine contre « ceux » qui ne comprennent pas et qui lâchement tuent. Et imaginer Audiard jeune avec son copain, la cachant sous des sacs de bougnats, la roulant sur charette à bras au travers de Paris en pleine insurrection libératoire (avec tous les excés que cela peut comporter), exiger d’un P.F. qui s’en fout des soins, du respect pour leur amie est un morceau de bravoure.
Nous, civilisés, (n’est-ce pas Monsieur Goux) nous huons ces barbares incultes et primitifs qui pratiquent la lapidation des femmes ….
des pas perdus
29 août, 2010 à 19:09
Cela donne envie de le lire.
Un petit bémol, en lisant le billet mais je me trompe peut-être, j’ai l’impression d’un « c’était mieux avant… ».
babelouest
29 août, 2010 à 19:21
L’anarchiste est pleinement homme (ou femme, le principe est le même). Ce qui s’est passé à la libération, c’est la résurgence de la bête chez certains humains, justement ceux qui s’étaient terrés, qui n’avaient pas « fait leur devoir » de défense du nid, un devoir que les animaux pratiquent, mais que bien des humains ont oublié, ou ont caché derrière leur égoïsme. Ne soyons jamais les résistants de la onzième heure, ceux qui attendent pour mordre que l’attaquant soit à terre.
L’anarchiste a une haute idée de ses responsabilités, de ses devoirs, avant ses droits. Les premiers déterminent les seconds. Combien de managers, de « petits chefs », de « grands chefs » ont-ils assez d’altruisme pour appliquer une telle règle personnelle ? Le « pouvoir ensemble », le « pouvoir avec » monte de l’assemblée de ceux qui se tiennent la main. Le « pouvoir sur » écrase indistinctement et bêtement, il suffit de voir ce qui se passe maintenant au niveau mondial.
lapecnaude
29 août, 2010 à 19:25
Non, cette impression est un peu trompeuse, Audiard ne s’est jamais remis de la mort de son fils, et il évoque cette partie de sa vie où justementil avait certes d’autres douleurs, mais pas celle-là, il croyait avoir tout subit quand il dit : voici vingt ans que j’écris pour ne pas devenir assassin … écrire était une façon de croire encore à quelque chose (sans compter les avantages que cela procurait), mmais ne le satisfaisait pas entièrement. C’était sa vie avant la mort de Myrette qui valait, après …
Didier Goux
29 août, 2010 à 20:33
Babelouest, je crains que vous ne caricaturiez l’époque. Ou au moins que vous jugiez a posteriori ce qui est toujours confortable. (Il m’arrive trop souvent de le faire aussi, je vous rassure.) Que signifie « faire son devoir » dans un moment où tous les repères s’effondrent ? Et croyez-vous que les gens qui ont suivi le Maréchal étaient tous des traîtres assumés ? Non, évidemment, je ne peux pas vous soupçonner de penser quelque chose d’aussi manichéen et bête. Beaucoup d’officiers supérieurs (presque tous en fait) ont refusé de suivre de Gaulle précisément parce qu’ils avaient le légalisme républicain chevillé au corps, qu’ils étaient le contraire de putchistes et que de Gaulle leur apparaissait comme un aventurier sorti de la légalité – ce qu’il était bel et bien, d’une certaine manière. Peut-on leur reprocher de n’avoir pas vu, dans l’effondrement de la débâcle le côté transcendant de ce général deux étoiles à titre temporaire ? Et puis, pour finir, quelle image aurions-nous de de Gaulle s’il avait finalement échoué dans son entreprise totalement folle ?
La Pecnaude : nous parlons d’Audiard, de Libération, d’épuration, de mort d’un fils, de vision de la nature humaine : quel besoin éprouvez-vous de ramener là-dessus la lapidation, et bien entendu en l’associant à mon nom ?
remi begouen
29 août, 2010 à 22:22
Lapecnaude – Cela m’a touché que tu fasses le rapprochement -exact – entre les épreuves d’Audiard et les miennes, devant la mort, si cruelle, injustifiable, d’un ami…
Puisque, depuis, je n’ai cessé de cultiver des amitiés – chaleureuses – avec bien des arabes, si souvent politiquement conscients et radicaux d’idées, il m’est bien sûr arrivé de leur parler de ‘l’anarchie’. Presque toujours, il y a incompréhension et refus pour eux de cette tradition occidentale, parce qu’athée. Même pour ceux, nombreux, qui ne sont plus pratiquants musulmans, mais le restent culturellement… comme d’ailleurs bien des athées se font une ‘religion’ de leur athéisme !
Donc, à propos du mot anarchiste, qui renvoie au 19° siècle, je préfère, n’en déplaise à Lediazec, celui de libertaire (agnostique plutôt qu’athée), et depuis une vingtaine d’années, je propose celui d’ACHARNISTE, ce qui plaît bien à mes potes arabes en tout cas…
lapecnaude
29 août, 2010 à 22:38
Monsieur Goux, Audiard a souffert de la mort barbare de son amie Myrette , mais il ne faut pas oublier qu’elle n’a pas été la seule dans son cas, dans mon village deux femmes (mère et fille) ont été égorgées, et ce n’était pas en vertu de la Charia, ni par des « arabes que vous n’aimez guère » mais pas des « vrais français patriotes »… je ne vous cache pas qu’ils ne sortaient pas des maquis (il y en avait pas loin, ceux-là on les connaissait) mais de la populace. Après tout, c’est si loin 44 !
babelouest
30 août, 2010 à 5:49
Didier, je suis conscient que De Gaulle eût pu échouer, malgré le ralliement d’hommes comme Maurice Schumann, qui fut l’un des rares français qui entendirent directement son appel, sur la radio d’un café que je connais bien. La France aurait probablement été « libérée », à une date probablement assez proche de celle que l’Histoire a retenue. Nous serions encore, probablement aussi, sous le régime de la IVème République, et assujettis depuis ce temps-là aux desiderata US. Gamin, je les connaissais bien, ces GI’s qui conduisaient les GMC de ravitaillement. Collégien, j’en voyais passer des convois et des convois, les jeudis de sortie, arrivant de La Rochelle et se dirigeant vers Poitiers et le reste de l’Europe. Ils avaient même reconstitué un village américain, où ils vivaient avec leur famille, et que nous longions avec curiosité. Ils avaient des voitures impressionnantes !
Assurément la Libération fut une période de grande tension, comme la Révolution, avec ses pages sublimes, et ses souvenirs honteux. Il faut noter que, les moments d’euphorie passés, ce sont les médiocres qui surnagent à nouveau, portés par leur besoin de dominer, et leur manque de sagesse. Les « grandes âmes », comme on les appelle parfois, sont rentrés dans le rang non par pusillanimité, mais au contraire par humilité.
Rémi, pour moi le mot « libertaire » me paraît légèrement inadéquat, sans doute parce qu’il paraît mettre sous le boisseau la notion d’égalité portée par le concept d’anarchie. Quant à la distinction entre athée et agnostique, dans la pratique elle est effectivement assez floue tant il peut y entrer des nuances entre personnes.
L’important n’est-il pas de vivre ses propres convictions, sans se préoccuper de savoir si d’autres les partagent ? Le prosélytisme est toujours une arme, d’autant plus dangereuse que celui qui l’affiche se croit sincère.
remi begouen
1 septembre, 2010 à 20:03
Babelouest – Tu as raison, ‘dans la pratique la distinction est floue entre athée et agnostique’… en général, pour beaucoup de gens qui, proches de l’anarchiste ou du libertaire (autre distinction flue…) sont d’abord et surtout dévoués à améliorer la condition sociale, contre les puissants riches, etc. Mais j’avais en tête certains ‘athées militants’ de ma connaissance qui, hélas, ramènent tout problème social au curé, le pasteur, l’immam, etc : l’opium du peuple’, en oubliant le dieu-fric!…
laetSgo
3 septembre, 2010 à 18:43
Ô Lapecnaude, cette note de lecture est absolument magnifique ! Je suis en train de lire Céline (oui, pour la première fois, il n’est jamais trop tard !) et je vais me précipiter pour trouver ce bouquin, ou un autre d’ailleurs d’Audiard, dès que j’aurai terminé.
Quant à ton pessimisme au sujet de ces français « poivrots, combinards, délateurs, lèche-train, anonymographes » (et je rajouterais, opportunistes et lâches), je crains de le partager…pas certaine, au contraire, que les mentalités aient évolué dans le bon sens depuis 60 ans. Il suffit de voir l’odyssée parano et xénophobe – qui a fait mouche – de Sarko et de ses sbires cet été pour s’en convaincre…