1 DG et l’armée
Le lieutenant-colonel de Gaulle, en 1934, avait su, deviné et écrit ce que serait l’invasion allemande en France, six ans plus tard. Pour lui, seules des forces blindées indépendantes très mobiles, très professionnelles, pouvaient assurer une défense en profondeur de notre frontière du nord-est : quitte à l’accomplir grâce à la meilleure défense, qui est l’attaque. Il était logique, selon cette conception très dynamique des rapports de force, qu’il se repliât en Angleterre pour affiner sa revanche. Beaucoup, à l’époque, ne l’ont pas compris.
La Ligne Maginot, joyau de la défense fixe et passive, même aujourd’hui, occupait les pensées, et les rassérénait face à des forces aux conceptions trop différentes pour être simplement craintes. Le débordement de cette Ligne dans un secteur qui paraissait un rempart naturel, les Ardennes, les déstabilisa complètement.
L’invasion en route, l’officier qu’était De Gaulle se heurta aux visées politiques des américains, Eisenhower en tête, qui se préparaient à annexer notre pays comme ils l’avaient opéré ailleurs sans coup férir. C’est lui qui gagna grâce à sa ténacité. C’est pourquoi, dès qu’il le put, il mit en place la force française de dissuasion : bien modeste au départ, elle n’est pas négligeable aujourd’hui. Il est fort regrettable que depuis trois ans, ce soit un agent de ces mêmes USA qui ait l’accès au bouton rouge.
Jeune admirateur de de Gaulle, c’est Jacques Chirac qui mit en place officiellement l’armée de métier française, sur le modèle du petit livre de 1934. Aujourd’hui, cette force, très diminuée par des budgets de plus en plus restreints, ne peut plus servir que de supplétif bien commode aux soldats US. On peut comprendre que les relations entre le chef des armées, et les officiers généraux de la vieille tradition, ne soient pas obligatoirement au beau fixe.
2 DG et l’Algérie
C’est au Maghreb que De Gaulle s’est ouvertement opposé aux américains, qui lui préféraient Giraud, plus docile. Il connaissait le terrain. Il n’aimait pas particulièrement les autochtones, dont il ne parlait pas les langues. Son appui était formé de français de métropole, même si des harkis et d’autres volontaires étaient enrôlés dans des régiments qui partaient en première ligne, des sacrifiés en somme. Les survivants, et les enfants des autres, n’ont jamais été remerciés par lui pour ces sacrifices. Pourtant, les harkis furent le fer de lance de l’armée débarquée en Provence en août 1944.
En avril 1958, son « Je vous ai compris » n’était que stratégique : il voulait, en accordant le droit de vote à tous les algériens, faire un plein de voix pour ce qu’il envisageait, quitte ensuite à trahir tout le monde. Tout le monde lui en a voulu. Le moment venu, en 1962, il a décidé de négocier avec les plus terribles et les plus acharnés de ses opposants, ceux du FLN. Déroutés, les plus modérés, du MNA par exemple, furent exterminés par les jusqu’auboutistes.
Les accords d’Évian scellaient la fin du conflit pour certains français, tout en exacerbant le ressentiment de ceux qui avaient cru à sa parole, et ont voulu le lui faire payer. Ses réactions furent mesquines et indignes d’un grand homme : au lieu de proposer une discussion avec les meneurs ulcérés, il fit assassiner, sans doute en réaction de sa peur, le colonel Bastien-Thiry qui avait organisé l’attentat du Petit-Clamart. L’extrême droite ne le lui a jamais pardonné, semble-t-il.
Quant à l’Algérie, elle continue à souffrir sous la poigne de fer et de compromissions des anciens du FLN et de leurs élèves. De façon détournée, elle demeure une colonie française, bien que cet aspect n’apparaisse guère au grand jour.
3 DG et la démocratie
De Gaulle avait une conception particulière de la démocratie : il était l’homme providentiel, ses paroles étaient nécessairement les plus justes, les plus vraies, les plus adéquates au « peuple français » qu’il aimait de loin, sans vraiment le connaître. Il a donc pensé de cette façon-là dès la fin de la guerre, et s’est fait renvoyer à ses chères études à Colombey les deux églises par des politiciens issus du CNR qui n’avaient pas les mêmes conceptions. C’est là que furent édictées toutes les mesures qui font notre admiration aujourd’hui sur les congés, sur la sécurité Sociale, sur les retraites…. tout ce que l’OCCUPANT actuel de l’Élysée veut abroger et démolir au bénéfice de sa famille et de ses potes.
Malheureusement, la constitution de la IVe République était ainsi faite que, démocratie oblige, toutes les tendances de la vie politique étaient représentées à l’Assemblée. Le risque était que nulle majorité, obtenue sur un sujet, ne permettait de penser que le lendemain, sur un autre sujet, la même fût reconduite. C’est normal, c’est justement cela, la démocratie.
Comme cela n’arrangeait pas les politiciens, qui aiment bien la stabilité et la facilité en général, et qu’à Alger des généraux avaient pris le pouvoir, quelques hommes allèrent le solliciter dans sa retraite pour qu’il apportât un gouvernement plus cohérent et durable (des cabinets ne tenaient pas 24 heures, parfois). Se faisant prier, il accepta sous conditions. Il réprima le putsch d’Alger. Et ce fut la rédaction de la nouvelle Constitution, celle de la Ve République, sous la direction de Michel Debré. On peut dire qu’elle fut plébiscitée, par 79,25% des voix. Elle donnait bien plus de pouvoirs au gouvernement face au Parlement, donc plus de stabilité, mais plus de risques de dérapage vers une dictature.
De Gaulle n’était certainement pas un démocrate. Il obéissait aux lois. En revanche, la politique étrangère fut son œuvre quasi exclusive. Quant aux textes passés en force, ils furent assez nombreux grâce au recours au fameux 49-3, qui bloque le vote sans débat. La motion de censure, article 49-2, réussit rarement à compenser ce handicap pour les parlementaires. C’est ainsi que, malgré sa boutade en 1965, « Vous avez déjà vu un dictateur en ballottage ? », il réussit à mener la politique qui lui convenait jusqu’en 1968.
Il est symptomatique qu’à ce moment-là, se sentant affaibli, il ait pensé très sérieusement à faire marcher les troupes sur Paris pour ramener SON ordre. Sa fuite (il n’y a pas d’autre mot) à Baden Baden, le 29 mai 1968, auprès de Massu, général en chef des forces françaises en Allemagne, n’a pas d’autre motif. C’est son premier ministre, Pompidou, qui saura reprendre la situation en main sans bain de sang.
De Gaulle était peut-être plus faible qu’il ne voulait bien l’admettre. Ses violentes colères étaient d’un homme qui se dominait mal. Sa droiture allait jusqu’à une certaine limite. On dit cela des politiciens en général, qui ont une vision très élastique de la probité, de la fidélité, de l’honnêteté. Certains ont voulu lui tresser une légende qui allait à l’encontre de ce cas général, il faut certainement nuancer un peu le propos. Il ne fut pas le pire. Il fut ce qu’il était, ni parfait, ni le plus goujat, avec une idée de son rôle que le troupeau au pouvoir actuellement ne possède en rien.
b.mode
2 octobre, 2010 à 2:04
Du poids lourd aujourd’hui en ce début d’octobre ! Babel nous cause du général de canne à pêche, laetsgo nous livre les secrets de son baeckaoffa ainsi qu’un rébus mystérieux ! Et forcément c’est Gainsbarre qui accompagne le tout à Strasbourg en chantant la marseillaise devant les paras ! J’oubliais, la une du jour est chose promise, chose due, Rémi celle du génial Fakir et mon r’né s’éparpille façon puzzle !
lediazec
2 octobre, 2010 à 3:26
Il est tôt, je file pétrir un brin à la boulange. Babel n’hésite pas, oui, mon général ! Tout est en place et c’est nickel ! Phrase du jour en place. Une découverte, encore une.
A tout à l’heure.
Dernière publication sur Kreizarmor : Place Vendôme, haut lieu de l'indécence
b.mode
2 octobre, 2010 à 7:36
« Plus de dérapage vers une dictature » On en est là, mon bon Jean-Claude !
Laetsgo
2 octobre, 2010 à 10:17
Pas tout à fait d’accord avec l’analyse critique du General…Malgré toutes ses erreurs, je pense qu’il avait quand même une certaine idée de la France (qu’on partage ou pas) qui était désintéressée…je veux dire par là que ce qu’il a fait, ce n’était pas pour en tirer profit, lui personnellement, contrairement au locataire actuel de l’Elysée dont on peut être assuré que TOUT ce qu’il fait profite à sa clique, au détriment du plus grand nombre !
Remi Begouen
2 octobre, 2010 à 10:58
Babelouest – Tu nous donne un ‘bon cours d’histoire du gaullisme’ avec quelques erreurs sur les quelles je reviendrais.
Mais déja, en gros, je ne suis pas d’accord pour ‘vanter DG’ par rapport à son actuel successeur, qui est certes pire et renégat de l’héritage. Pour moi, il faut une VI°Constitution qui fasse sauter le verrou de l’élection présidentielle, plébiscite déguisé : on est en train de crever dans ce carcan. Celui que dénonça Mitterrand dans ‘le coup d’état permanent’, analyse qu’il s’empressa de renier lorsqu’il entra à l’Elysée : empoisonné, lui aussi!
Dans ma prime jeunesse j’étais gaulliste, en 1945. Ne serait-ce que par la Libération de la France (pays que je ne connaissais pas encore!) cependant que mon père, au canal de Suez était ‘fidèle au Maréchal’ : tout premier conflit entre nous. A l’école, vers 42-44, on se battait entre fils de ‘péteux’ ou de ‘déguelis’, 1°’école politique’!
En 1958, je n’avais pas encore le droit de vote (majorité à 21, j’enavais 19). Mais (réconciliation!) j’ai contribué à faire de mon père un gaulliste! Pendant 2 ans, j’ai même plus ou moins cru à la propagande ‘L’Algérie de Papa est morte, Vive l’Algérie Nouvelle…Française’. C’est pour cela que j’ai fait deux stages d’étudiant en Algérie (étés 59 et 60) : ‘Le piège’… dont je témoigne dans un long essai. Puis de décembre 60 à décembre 62, le SM (Allemagne et Algérie…mais après le cessez-le feu). Je fus donc témoin de l’Indépendance de l’Algérie, dans une ambiance folle, où notre ennemi était devenu l’OAS!…
Très vite – 63-65 – je suis devenu militant anti-impérialiste (Vietnam, Palestine) et anti-gaulliste. Avec bouquet final en mai 68 au quartier latin.
Tout ça pour dire que j’ai une autre approche, un autre vécu que toi du régime gaulliste (versions DG et successeurs dont Mitterrand, et notre petit Pétain -péteux- actuel.
Mais je reviendrais sur une erreur que tu fais, à propos de ‘harkis’. En tout cas j’ai beaucoup apprécié l’effort d’historien que tu fais avec cet article.
babelouest
2 octobre, 2010 à 11:22
LaetSgo, c’est bien ainsi que j’avais conclu, il me semble. La France était, depuis toujours, sa priorité. Nul esprit de lucre, à comparer avec ce qu’on déplore aujourd’hui : un vol de vautours s’acharnant sur une France encore pantelante, pour extirper la moindre miette de profit.
Rémi, pour ce qui concerne la Ve république, je me réfère toujours à sa toute première mouture, où le président de la république était élu par des élus, ce qui amortissait considérablement le côté tapageur des campagnes. En revanche, l’article 49 le rend très fort, mais il n’est pas le seul. En fait, tout le système sous-tendu par ce pilier de la république est à revoir. Il faut une VIe république : bizarrement, Montebourg, qui en avait fait sa pierre de base, n’en parle plus.
b.mode
2 octobre, 2010 à 12:09
Mon paternel fut un des français à ne pas voter la constitution car il avait perçu la dérive possible. Son idéal d’homme politique fut et reste encore Mendes France…
Remi Begouen
2 octobre, 2010 à 12:27
Babelouest- Si bizarre que cela te paraisse, je crois que si Montebourg n’en parle plus, c’est qu’il se parjure, à l’exemple de Mitterrand qui avait fait ‘sa pierre de base’ du pamphlet ‘le coup d’Etat permanent’…
J’envoie bientôt ma note à propos du mot ‘harki’.
clarky
2 octobre, 2010 à 12:53
dg et l’algérie, je t’aime moi non plus… en parlant de ça, y’avait un bon reportage sur les harkis (enfin, perso, je l’ai trouvé intéressant ce doc) dernièrement sur france 2 ou 3, je sais plus vu que j’ai la tête à l’envers !
maintenant, sincèrement, le gaullisme je m’en tamponne un peu le coquillard, comme le mitterrandisme du reste, sans parler du giscardisme qui fut la plus belle escroquerie qui soit.
quitte à te choquer mon bon rémi, je te dirais que l’oas ne valait guère mieux que le fln et vice et versa, mais là je vais pas plus loin sinon ça va partir en vrille
Remi Begouen
2 octobre, 2010 à 12:57
Avant de revenir sur l’erreur que tu fais, Babelouest, sur le mot ‘harki’, cette information : depuis bientôt 4 ans, j’ai rejoint la téméraire ‘Association des Anciens Appelés en Algérie CONTRE la Guerre’, 4ACG – voir le site http://www.4acg.org
(Il y figure même, en pièces annexes, la quasi-intégralité de mon essai ‘Le Piège’, dont je n’ai plus la version papier disponible. Avis aux amateurs.)
Actuellement, il y a vif débat dans 4ACG (‘en interne’ pour le moment) sur notre attitude vis-à-vis du ‘problème harki’. En très gros, entre deux tendances (si courantes partout) qui sont ‘chrétien démocrate’ (la repentance, etc.) et ‘anti-impérialiste’ (l’Etat doit réparer son passé colonial, etc.)… C’est dire, notamment depuis les films ‘Indigènes’ et ‘Hors-la-loi’, que la plaie reste vive, dont le problème harki…
Babelouest, Les soldats Algériens de la fin de la guerre 39-45 n’étaient pas harkis, mais tout simplement mobilisés – on se rappelait opportunément qu’ils étaient citoyens français, dans ce cas précis ! Ils fournirent de gros contingents à l’armée française renaissante, à partir du gouvernement provisoire de De Gaulle, installé à Alger. Encore plus que les autres maghrébins et africains noirs, enrôlés en tant que ‘sujets de l’Empire’.
C’est pourquoi la plupart des historiens voit dans la date du 8 mai 45 le vrai début – souterrain jusqu’en 54 – de La guerre de Libération d’Algérie.
Ce jour là, à Sétif comme partout, on fêtait la victoire sur le nazisme et les Algériens y associaient spontanément la victoire sur le colonialisme. Ben non : Il y eut certes quelques débordements côté ‘Indigènes’ contre des colons, mais des représailles énormes, des semaines dans la région, menés par l’armée et les milices des colons. Pour la gloire de la France coloniale…, éternelle…
Le mot ‘harki’ n’est officiel que depuis la guerre d’Algérie et désigne les ‘supplétifs’ locaux de l’armée française, qui avait aussi des bidasses Algériens (‘Français de souche musulmane’!) faisant leur Service Militaire.
C’est très souvent la misère, les pressions, la menace, etc. qui ont entraîné tant et tant de braves types à devenir harkis. Donc souvent des ‘Malgré nous’ comme se désignent les Alsaciens enrôlés dans la Wermacht. Vu la longueur et l’intensité de la guerre d’Algérie, le fait aussi que lorsqu’on s’aguerrit (brr !) on bascule dans la cruauté, de part et d’autre… il n’est pas étonnant que les harkis aient tant souffert de la victoire du FLN : massacres en Algérie… et pour ceux qui ont pu fuir en France, misères… qui s’étendent aux familles, aux descendants ! Aujourd’hui enfin s’amorce de difficiles réconciliations, en Algérie, et reconnaissances de dettes, en France. Ceci est l’objet de notre débat, encore interne, à 4ACG. Lorsqu’il deviendra public, je ne manquerai pas d’y revenir.
frugeky
2 octobre, 2010 à 14:07
Ok sur la probité du bonhomme, sur une « certaine idée de la France », aussi sur sa vision avant-guerre de l’utilisation des blindés mais pas d’accord sur la sécu. C’est pas de Gaulle qui a porté tout seul cette idée. il était même un peu à la traîne même si il ne s’y est pas opposé. De toute façon à l’époque il eut été pour le moins malvenu de s’opposer frontalement avec les membres du CNR. Aussi bien on retrouve dans ses « Mémoires de guerre » une participation des ouvriers à la gestion des entreprises, qui était une proposition du CNR, et qui n’a malheureusement pas été suivie d’effet. A ce propos il n’est pas trop tard…
babelouest
2 octobre, 2010 à 15:14
Frugeky, précisément j’ai laissé entendre que DG n’était pas en excellents termes avec ceux du CNR, qui étaient d’ailleurs les français de l’intérieur, ceux qui ont subi jusqu’au bout l’occupation, et qui, d’origines diverses, ont fraternisé et développé en commun un programme pour l’après, pour la reconstruction.
Quant à la participation, il a existé deux choses : dans les entreprises importantes, un délégué du personnel siège au conseil d’administration ; et les employés reçoivent une prime de participation. Il n’est pas certain que ces dispositions existent encore. Je ne retrouve rien qui en parle sur le Net.
babelouest
2 octobre, 2010 à 16:29
A propos de la percée des Ardennes, je me dois de rendre hommage à un homme qui compta parmi les nombreux réfugiés ardennais de 1940, dans mon village si loin du front. Cet homme, un peu tête brûlée, avait osé tenir tête à l’invasion dans un point stratégique, le pont de Givet. Armé de son seul fusil, il se déplaçait constamment, tirait un coup, criait, tirait un autre plus loin… Bien entendu, il ne put pas contenir très longtemps seul contre tous, et dut se replier. Plus tard, il fut fait prisonnier, et dans le camp où il était, il entendit l’un de ses gardiens raconter qu’il était là parce qu’il avait été blessé au pont de Givet. Il faut dire que le héros de l’histoire parlait allemand. Il ne s’est pas vanté devant le gardien d’avoir été probablement celui qui l’avait blessé. Il s’est échappé peu de temps après. D’autres personnes, réfugiées comme lui, le connaissaient, et ont confirmé ses dires.
Il s’appelait Gillequin. Chapeau, Monsieur. Mes parents m’ont souvent raconté ce fait d’armes, quand j’étais petit.
Fifi d'Ardèche
2 octobre, 2010 à 19:35
J’étais bien jeune à l’époque de De Gaulle , mais je me souviens qu’à cette époque-là, on avait une toute autre image de la France, tant en France qu’à l’étranger, que celle qu’on en a aujourd’hui…
lapecnaude
3 octobre, 2010 à 19:25
Ah Babelouest, de Gaulle, que n’a-t-on pas dit ou écrit sur le grand homme ? (vrai qu’il était grand, à côté de moi, il m’a fait tout drôle et je n’avais que dix ans ! ).
En 58 quand il a dit : Vive l’Algérie Française », c’était évidemment parce qu’il avait besoin des voix des pieds-noirs, il n’était pas encore sûr de l’électorat métro. Mais il ne serait pas faux de dire qu’il se préparait déjà et depuis longtemps à se débarasser de l’empire colonial français, depuis Dien-Bien-Phu en fait. De Gaulle n’a JAMAIS accepté une défaite. Et depuis la Libération il savait très bien qu’on ne pouvait rien contre un peuple qui réclame sa liberté. Il s’y était préparé depuis 46, il entretenait ses réseaux, tant militaires que civils (ils étaient partout dans l’administration, la police, la bourgeoisie qui prenait de l’essor). Chaque semaine, il allait passer deux jours à Paris, à sa permanence où il « consultait », presque pas à la Boisserie, il n’a jamais mélangé vie privée et vie publique.
Je me souviens encore (vrai, je l’ai encore dans mes oreilles) de son « je vous ai compris » en mai 58 sur la place de la Brêche à Constantine, déclanchant une immense clameur de la foule de pieds-noirs, d’arabes, de juifs, mélangés et hurlant « Algérie Fraçaise », « Vive de Gaulle » et entonnant le Chant des Africains …. et moi là dedans qui n’y comprenait goutte (c’est vrai) qui pensait seulement que cela n’allait pas se passer comme çà, que çà allait remuer et qu’en rentrant au douar on allait pas avoir de surprises mais une palanquée d’égorgés à identifier et à enterrer … ce qui fût.
Sa V° République et sa Constitution, elle était préparée depuis longtemps, avec Senghor notamment, il n’a jamais craint l’armée, il s’en est servi, manipulant les généraux au bout de leurs ficelles, reste à savoir dans quelle mesure il n’a pas été plus ou moins l’artisan du putsh (autrement pourquoi se serait-il réfugié auprès de Massu – qui n’était pas une lumière, mais un petit garçon bien obéissant), pourquoi y laisser aller Salan qui était de la faille Borgeau (un des plus grands exploitants d’Algérie, mec pas trop clair en Indo, une fortune …). Vous vous souvenez « un quarteron de généraux en retraite ! » Il était génial dans son rôle.
Ce qu’il n’avait pas prévu, çà a été l’OAS, et il n’a pas pardonné à Bastien-Thierry parce qu’il était militaire et qu’il avait bafoué l’honneur de l’armée, çà il y tenait.
Quand au reste il savait « qu’on ne fait pas d’omelette sans casser ds oeufs », dommages collatéraux, il s’est fait déborder sur les harkis par des subalternes bornés (pas tous heureusement).
La seule chose qui lui importait c’était le Sahara, il voyait loin.
Il suivait les lois. Sûr c’était lui qui les avait faites … On peut ne pas être d’accord avec mes opinions (si ce sont des opinions, mais j’ai plus l’impression d’avoir des flash-backs de cette époque), mais je ne peux pas évoquer cette sans un petit sourire en coin.
Remi Begouen
4 octobre, 2010 à 11:00
Très d’accord avec toi, Lapecnaude : tes ‘flash back’ sont excellents, jusqu’à ton actuel ‘petit sourire en coin’… après avoir vécu les drames de 58 en Algérie.
Oui, DG voulait el Sahara… pour y faire péter sa bombe. Quel exploit, dont on paie encore les pots cassés aujourd’hui (civils Touareg et bidasses français irradiés)… et cela a longtemps continué au Pacifique, avec autres pots cassés (y compris dans la nature – coraux et couches géologiques profondes y compris…
Tout cela pour être ‘petit dans le club des grands’… rejoints de fait par des outsiders difficilement contrôlables – Corée du Nord, Inde, Pakistan, Israël… peut-être bientôt l’Iran.
On croit que le danger de guerre nucléaire est passé, on a tort.
‘Faudra bien que ça pète quelque part un jour’ disent les militaires, ‘puisque les armes sont faites pour être employées’. Et c’est le seul point d’accord (façon de parler!) que j’ai avec eux, faisant parti des citoyens pessimistes ! – Sauf si NOUS imposons le déarmement TOTAL en prenant le pouvoir, avant BOUM!
Remi Begouen
4 octobre, 2010 à 11:06
Précision sur ma conclusion précédente : la fin du gaspillage de fric pour les arsenaux nucléaires entraînerait la fin de la crise et de son moteur le capitalisme. Ce serait LA révolution…
lapecnaude
4 octobre, 2010 à 16:05
A une variante près, Rémi, DG voulait le Sahara pour ETRE LA FORCE DE DISSUASION EUROPEENNE avec sa bombe, il pensait Europe, le reste il s’en foutait, il était américanophobe, anticommuniste, et il pensait PETROLE et GAZ… il voyait plus loin, plus grand que ce qu’en ont fait les minus qui l’on suivi.
On reparlera les collatéraux plus tard, des harkis par exemple !
Et redétrompe toi encore, il respectait les Touaregs … drôle de bonhomme.
lapecnaude
4 octobre, 2010 à 16:07
Il est évident que maintenant, TOUT passe par un désarmement nucléaire mondial, mais ce ne sont que des hommes, en Corée, en Iran là sont les vrais problèmes.
Remi Begouen
5 octobre, 2010 à 12:07
Pas d’accord avec toi sur ‘le drôle de bonhomme’ DG.
Tu écris ensuite (second message) ‘ce ne sont que des hommes’. Pour moi, DG en fait partie comme aussi, tout ‘drôle de bonhomme’ soit-il pour toi. Tu écris aussi ‘en Corée, en Iran là sont les vrais problèmes’. Hélas non : Ils sont certes là, mais ailleurs, partout (Pakistan-Inde : guerre possible… Israël-Iran aussi) Et puis, SURTOUT, il y a des FOLAMOUR partout, en Russie, aux Etats-Unis, en Chine, ici… avec LE bouton rouge à portée de main folle …
La bombe atomique aurait dûe être interdite depuis 1945.
On arrive bien, enfin, a interdire (à peu près) les horribles ‘bombes à sous-munitions’ (Bravo Handicap International) après interdiction des horribles gaz de 1917…
Alors, il faut interdire la B.A…. partout !
J’ai signé, grâce à toi, la pétition pour le moratoire sur les OGM en Europe. C’est important. Mais encore plus le nucléaire, militaire et civil…